Le 6 juin 1977, l’église Saint-Pierre-des-Cuisines, lieu éminent d’archéologie et d’histoire, était classée Monument Historique. Le vocable de cette église, une des plus anciennes de Toulouse, a suscité bien des débats entre historiens..
A l’époque romantique, l’église était un lieu romantique avec son enfeu roman comprenant un sarcophage comme le montre une belle illustration d’époque.
Un vocable très débattu
Le comte de Toulouse Guilhem IV Taillefer avait exempté d’impôts les habitants des alentours de l’église et les aurait autorisé de cuire dans des fours particuliers, sans l’obligation d’utiliser les fourneaux du comte : les habitants auraient été appelés “coquins” en relation avec le verbe latin “cuire”, d’où l’appellation “des cuisines”..
Pourtant, l’église Saint-Pierre “des Cuisines” a été mentionnée en lien avec le lieu (“via subtus Coquinas”) dans un acte autour de l’an mil.
Au Moyen Âge, les “coquins” étaient des gens pauvres “gens de peu d’importance”, des gueux : les “coquins” (le latin médiéval coquinus signifiait “mendiant”).
De fait, la population du quartier, situé hors du rempart gallo-romain était pauvre. Par ailleurs, un auteur évoque la présence près de l’église d’un collège pour l’éducation de douze pauvres ecclésiastiques. Mais les nombreux autres sens du mot “coquins” ont aussi fait échafauder d’autres d’hypothèses !
Le rattachement du vocable de l’église à ces “cuisines” est aujourd’hui retenue.
De la nécropole à l’auditorium
Aujourd’hui, c’est un auditorium qui nous enchante par ses nombreux concerts, dans une architecture dépouillée.
Une première église, une basilique funéraire, a été construite sur une nécropole entre 4e et 5e siècle. C’est donc une plus anciennes de Toulouse.
Le bâtiment actuel date des 11e et 12e siècles avec de beaux éléments romans (portail, mur avec fenêtres), avec d’importants remaniements et extensions aux 14e et 16e siècles.
Un lieu d’assemblées municipales
En 1067, le comte de Toulouse Guillaume V confirme le don du lieu à l’abbé de Moissac, comme prieuré de cette abbaye. En 1096, Raymond IV, dit “Saint Gilles”, partit à la première Croisade à Saint-Pierre des Cuisines. Plus tard, Simon de Montfort y aurait séjourné.
L’église a joué le rôle de première « maison commune » de la ville (Lahondès).
Les comtes réunissaient dans cette église l’élite de la ville et donnaient à cette dernière coutumes et règlements.
Revenons à la cérémonie d’avènement de Raymond VII dans ce lieu :
devant un grand concours de peuple et outre les vingt-quatre consuls en exercice, soixante huit invités de marque, au premier rang desquels les comtes de Foix, de Comminges et d’Astarac. Les grandes familles patriciennes de Toulouse étaient toutes représentées: les Castelnau, les Barrau, les Barragnon, les Saint-Ybars, les Rouaix, les De.Coussa, les Caraborde, les Béringuier, les Roux, etc., aux côtés de la fine fleur de la chevalerie vassale : Guillaume et Raymond Hunaud de Lanta, Jourdain de Roquefort, Pelfort de Rabastens, Sicard de Montaut- de toute évidence rentré en grâce – et bien d’autres, mélés à des seigneurs du Carcassès, du Rouergue, d’Albigeois, de Gascogne et du Pays de Foix : Guillaume-Bernard de Najac, Isarn d’Aragon, Arnaud de Marquefave, Bernard de Penne, Roger de Noé, Bernard-Amiel de Pailhès, Bernard de Marestan, Bernard Arrézat de Laurac, etc. Tous furent les témoins officiels de l’échange de serments auquel procédèrent celui qui était désormais Raymond VII, et les magistrats de la cité et du bourg de Toulouse. Les consuls jurèrent fidélité au comte; celui-ci s’engagea à leur être bon et loyal seigneur, et confirma toutes les franchises et coutumes de la ville ‘ » *
Michel Roquebert, L’épopée cathare. 1216-1229. Le Lys et la Croix. Privat
Cédée aux au chartreux établis à proximité à l’église Saint-Pierre-des-Chartreux, l’église paroissiale fut alors négligée. La Révolution française supprima la paroisse et en fit un lieu de l’Arsenal de Toulouse, utilisé comme salle d’armes, dépôt. Intégrée ensuite au domaine de l’Université, elle devient propriété de la Ville en 1982.
Références : guide archéologique, Musée Saint-Raymond. L’Auta, Mars 1999
Illustrations :.“Les voyages pittoresques et romantiques dans l’Ancienne France (1833)”, par Chapuy. “Le tombeau derrière l’église Saint-Pierre”. Photographies personnelles.